PORT-AU-PRINCE — Le photographe et naturaliste haïtien René Durocher a présenté Haïti Sauvage 2025, une exposition immersive de deux semaines célébrant la richesse exceptionnelle de la faune et des écosystèmes du pays. Organisée au Centre culturel Haïti-Brésil de Pétion-Ville du 3 au 16 octobre, l’exposition mêlait photographie grand format, projections vidéo et paysages sonores naturels, offrant aux visiteurs une expérience sensorielle unique et un appel à la préservation de l’environnement.
L’événement a mis en lumière plus de 180 espèces animales, dont le Kanson Wouj, ou « culotte rouge », oiseau national d’Haïti, symbole de beauté et de résistance, aux côtés de serpents, grenouilles et perroquets. Chaque image capture à la fois la fragilité et la résilience des écosystèmes haïtiens, invitant le public à renouer avec la nature.
« C’est incroyable de voir la diversité de la faune haïtienne ainsi mise en valeur. J’ai appris des choses que j’ignorais sur notre propre pays », a déclaré Victoria Collin, visiteuse de l’exposition.
Soutenu par UNIBANK, l’Institut Français d’Haïti (IFH), le Comité Interministériel d’Aménagement du Territoire (CIAT), l’Agence Nationale des Aires Protégées (ANAP) et l’Initiative Jeunesse et Biodiversité (IJB), Haïti Sauvage 2025 visait à sensibiliser à l’environnement et à inspirer les jeunes générations à protéger leur patrimoine naturel.
« La biodiversité est un trésor vital. La préserver permettra aux jeunes d’en tirer des enseignements et de s’en inspirer. Mon équipe et moi-même sommes pleinement engagés à aider chacun à comprendre, valoriser et partager cette richesse naturelle », a souligné René Durocher.
Un photographe au croisement de l’art et de la science
Né en Haïti il y a 58 ans, Durocher a grandi en pleine nature. Son père lui a transmis l’amour de l’observation et du soin des animaux, forgeant sa fascination pour la faune sauvage. Bien qu’il ait étudié l’électricité industrielle et domestique, il s’est tourné vers la photographie, un moyen de fusionner art et sciences environnementales.

Ancien professeur de sciences, Durocher a travaillé comme graphiste, photographe et vidéaste avant de se consacrer pleinement à la documentation de la nature. Son tournant professionnel est survenu au milieu des années 2000 lors de sa collaboration avec la Fondation Seguin sur un documentaire alliant observation animale et photographie.
Largement autodidacte, il est devenu naturaliste de terrain, animant depuis plus de dix ans des ateliers écologiques à travers Haïti et réunissant scientifiques et agriculteurs pour promouvoir la conservation et le développement durable.
« Mon objectif est de faire en sorte que les gens voient la nature différemment, qu’ils réalisent que chaque espèce compte et mérite d’exister », explique-t-il.
Un engagement environnemental concret
Au-delà de la photographie, Durocher est un défenseur actif de l’environnement. Il a fondé Eko Haïti, promouvant des réchauds écologiques à combustible biologique, et collabore avec Wastek SA, entreprise transformant les déchets agricoles en briquettes à combustion propre.
Il a également participé aux efforts de secours et de reconstruction après le tremblement de terre de 2010 et l’ouragan Matthew, renforçant sa conviction que protéger la nature, c’est protéger la vie et la dignité humaine.

Ses photographies, réalisées sur trois décennies, documentent les montagnes, parcs nationaux et zones protégées d’Haïti, de la Citadelle et du Parc national de La Visite aux forêts du Sud et de la Grand’Anse. Chaque image raconte la coexistence entre les communautés et leur environnement.
« Mon travail n’est pas seulement artistique, il est spirituel. Chaque photo est un acte de respect et un rappel que nous faisons partie de quelque chose de bien plus grand que nous-mêmes », confie Durocher.
Une archive vivante de la biodiversité
Le portfolio de Durocher constitue une archive visuelle unique des espèces endémiques d’Haïti. Il est l’auteur de Les Oiseaux d’Haïti (2014) et de L’Herpétofaune d’Haïti (2015), combinant rigueur scientifique et expression artistique.
Ses expositions passées incluent Haïti Sauvage / Macaya au Zoo de Lunaret à Montpellier, France, et des collaborations avec l’ambassade de Suisse en Haïti, l’Université Quisqueya et la Fondasyon Konesans Libète (FOKAL).
« L’association de photos, de vidéos et de sons rend l’expérience véritablement captivante. On se sent presque au cœur de la nature », note Frantz Louis, photographe et enseignant.
Haïti Sauvage 2025 est ainsi une rétrospective mais aussi un manifeste écologique, invitant les Haïtiens à repenser leur rapport à la nature et à protéger leur patrimoine vivant.
Une expérience immersive ouverte à tous
L’exposition est restée ouverte du 3 au 16 octobre 2025 au Centre culturel Haïti-Brésil, à une dizaine de kilomètres du centre de Port-au-Prince. Étudiants, familles et passionnés de nature ont été conviés à ce voyage sensoriel, célébrant la richesse naturelle et culturelle du pays.


